Comment expliquer la popularité soudaine des musiques africaines dans le monde de la musique électronique ? Awesome Tapes From Africa et ses rééditions de pépites oubliées, Auntie Flo et son label Highlife, le collectif parisien Mawimbi… Nombreux sont les projets récents mettant au cœur de leur musique les polyrythmies africaines.

S’il a toujours existé des précurseurs passionnés par les musiques noires, ces dernières années ont vu l’audience de cette musique « afro-électro » grandir en popularité. Fini les samples qui donnent une couleur ethnique à de la dance music en 4×4, cette fois ce sont la structure et les sonorités africaines qui sont au centre d’une musique électronique qui se délaisse des canons occidentaux du genre. Africaine 808 et leur album Basar récemment sorti en est un parfait exemple.

https://soundcloud.com/africaine-808/tummy-tummy-africaine808

Africaine 808 est un duo composé de Dirk Leyers et Hans Reuschl – aka DJ Nomad. Leur album, sorti en février, vient couronner une envie respective des deux producteurs allemands de travailler ensemble depuis leur première rencontre à la Fuckparade de Berlin en 2000. Pendant ces années, Dirk Leyers produit de la musique chez Kompakt et collabore avec plusieurs artistes, dont notamment Matias Aguayo sous le pseudonyme Closer Muzik. Hans Reulsch de son côté délaisse peu à peu la production après quelques sorties sur BPitch Control et se concentre sur l’organisation de sa résidence Vulkandance.

Ces soirées dédiées aux musiques africaines et latines lui permettent d’étendre sa connaissance de ces genres musicaux et d’inviter des artistes renommés pour des sets only afro – comme Hunee, Auntie Flo ou encore Beppe Lodda. C’est après le tournant des années 2010 que les deux hommes prennent finalement le temps de travailler ensemble. Par le biais d’un ami, ils obtiennent une TR-808, le « troisième membre du groupe », et leur collaboration devient alors Africaine 808.

https://soundcloud.com/thump/h-friend-africaine-808-remix

Au cœur de la musique d’Africaine 808 se trouve l’envie d’explorer le spectre des musiques de l’Afrique aux Amériques. Travaillant par sessions d’improvisations, ils jouent avec les genres, sous-genres et leur tempo (le duo n’a pas hésité à explorer la « slow cumbia » ou encore le « islandfunk ») et accordent plus de place à l’inventivité qu’à la reproduction de recettes musicales éprouvées.

Leur musique, bien qu’électronique, semble imprévisible et en constante progression. Cette sensation organique à l’écoute est renforcée par la présence sur l’album des deux percussionnistes Eric Owusu et Dodo N’Kishi – qui les accompagnent en live – et l’abandon des samples pour les instruments.

https://soundcloud.com/platform/africaine-808-balla-balla

Basar réussi le tour de force d’être un album cohérent malgré les multiples références musicales qui y sont incorporées. Le duo souligne de cette façon le lien de parenté musical qui s’est fait par le commerce d’esclaves entre les deux rives du « Black Atlantic » que sont les continents africain et sud-américain. La production de leur album ne les a pour autant pas stoppé dans leurs excursions musicales – ils ont sorti un nouvel EP le 7 Mars à la tonalité cosmic disco et se produiront pendant quelques rares lives en Europe, dont le seul en France sera aux Nuits Sonores de Lyon.