On vous en parlait il y a peu, le festival Maintenant étale sur deux semaines de festivités un programme mêlant musique électronique et arts numériques sous toutes leurs formes. On s’est rendu au week-end d’ouverture des festivités pour vous raconter l’expérience expérimentale à la sauce rennaise.
Notre arrivée en terres bretonnes condorde avec la soirée d’inauguration du festival, où Lucas Paris et Sentimental Rave ont été programmés dans le cadre plutôt impressionnant du Théâtre Vieux Saint Etienne, ancienne église du Moyen Âge reconvertie en lieu culturel. Erreur de timing, on loupe Lucas Paris – dont on recommande quand même la performance pour l’avoir déjà croisée sur le chemin du Mutek Montréal. À sa suite, Sentimental Rave dévoile plus de retenue qu’à son habitude gabber en tournant sa performance vers un versant plus techno, non moins appréciable pour cette heure encore jeune de la soirée.
Le lendemain, retour au même théâtre pour le début de soirée où Peach, Benjamin Cochois et Klass Sirius sont annoncés. À décortiquer la programmation, on découvre beaucoup d’alumnis de la plateforme SHAPE dans cette sélection 2019, parmi lesquels la torontaise Peach dont la Boiler Room a fait grand bruit l’année dernière. Et si « percer » avec une Boiler semble aujourd’hui la manière la plus facile d’être sélectionné dans tous les festivals du coin, la DJ transforme ici l’essai en ravissant le public rennais d’un set de house breakée au kick lourd, qu’elle agrémente de quelques touches de baile funk et de grime.
Pour le reste de la soirée, direction ensuite l’Antipode pour le gros des festivités de la Nuit Electronique. On débarque alors que la figure de proue du Nyege Nyege Slikback commence tout juste son set. Peut-être conscient de sa présence dans une région « temple » du hardcore, le kenyan agrémente ce soir sa selecta de sons breakés proches d’une trap insufflée d’infrabasses avec une techno assez proche du hardcore. Quelques passages de rap US font mouche sans trop s’éloigner des eaux sombres qu’on lui connaît.
Des bases de rythmiques africaines rapidement enchaînées avec du hardcore ou de la computer music aux remix dancehall et hip-hop coupés par des rythmes techno et des discours en chinois, Slikback affirme son côté inclassable, et le public suit.
La suite s’enchaîne avec Errorsmith, à son habitude bien décidé à ne pas ménager son audience. Le BPM de son live affiche très haut dès le début du set et s’agrémente d’une multitude dissonante de sons tintants, du gros clocher d’église au petit triangle. Pas forcément agréables pour les oreilles néophytes, les drops bien lourds de basses et d’infrabasses mixés avec de la jungle mitigent une partie du public pas forcément prête pour un live aussi expérimental – au point qu’on entendra évoquer les mots « musique dépressive » entre deux couloirs. Ne leur déplaise, Errorsmith ne lâchera rien jusqu’à son final, croisant le fer avec ses machines jusqu’au bout du set.
Si Errorsmith aura démotivé les fêtards plus aptes à danser sur de la techno classique, la soirée n’est pas encore finie pour eux. On croisera d’ailleurs aux abords de la salle des remotivateurs en tous genres – car peu de choses semblent pouvoir lasser un rennais qui danse, surtout lorsqu’on l’accompagne d’un : « hey les loosers assis par terre, on est pas dans une gare là, levez-vous et venez danser sinon demain je vous emmène à l’église ! ». Et le dernier set de Cera Khin saura donner aux gens ce qu’ils attendent à cette heure : du kick lourd et de la grosse techno berlinoise, totalement dépourvus de subtilité mais ayant le mérite de se montrer efficace pour les derniers danseurs de cette nuit à l’Antipode.
Notre aventure au Maintenant s’arrêtera là, même si de nombreux artistes alléchants à l’affiche (Michela Pelusio, Crystallmess, Astrid Sonne, Pantha du Prince, Upsammy, Mad Miran) auraient facilement pu nous laisser nous attarder quelques temps en terres bretonnes.
Crédits Photos : Victor Guillaud-Lucet