« Premiers pas » dans l’arène

Dans la file d’attente des bouteilles de mauvais mélanges passent de mains en mains. En plus d’une excitation palpable, l’air est chargé d’une légère odeur de vomi. Arrivé dans la salle à 1h35 après avoir joué des épaules et m’être senti comme un mouton suivant le troupeau, je me laisse doucement entrainer par le son les voix électro chill classique que passe Rippertone.

Du haut du premier étage du Ninkasi Kao les danseurs ont une impression de privilège. Sous leurs pieds, la foule grouille comme des vers habités par le son. Dans la chaleur ambiante, au milieu de la rambarde, je suis le Roi poisseux du Ninkasi Kao. Il est néanmoins assez difficile de se laisser aller dans la musique. La température devient difficilement soutenable, et l’étage, construit en escalier, oblige les fuyards à bousculer ceux qui tentent de profiter.

Vidéo performance @ Ninkasi, Lyon by Encore & Papa Maman

Welcome to the Jungle

Le Dj hoche sereinement de la tête en balançant une musique phrasée. Les points de suspensions sont posés par une charley soutenue. La grosse caisse ponctue la fin de la phrase. C’est une véritable machine de l’illusion en marche. Tout le monde est emporté dans son sillage.

Le son se fait plus naïf, puis évolue en marche pachydermique. Dans la lumière bleutée des spots, nous vivons une scène digne du Livre de la Jungle versus Las Vegas Parano. À la manière de Sheer khan aveuglé par les flammes, Octave One devient sauvage. Il lance des coups de griffes dans l’air et déchire l’atmosphère.

Focus : Octave One est un groupe de techno américain formé par les frères Burden, Lenny et Lawrence, parfois rejoints par Lorne, Lynell et Lance, soit en tout 5 frangins qui partagent le gène techno. De la même génération que les papes du genre Carl Craig et Jeff Mils, ils créent en 1990 le label 430 West qui participe fortement à la seconde vague de la techno de Détroit tout en s’aventurant vers la house old school.

3h30, finies les petites montées subtiles. De grosses basses et une batterie binaire commencent à tabasser. Puis, rappel au calme. Ça c’est un set rondement mené ! Quand on sent la fatigue arriver, le tempo ralentit pour nous laisser reprendre haleine. Et doucement, les deux frères viennent chercher notre énergie pour mieux nous faire exploser. Octave One est resté assez mainstream. Il a joué les morceaux que son public attendait et celui-ci était loin de le bouder. Avant la fin du set des deux frères de Detroit j’avais rejoint Malo sur son perchoir. C’est lui le maître des images. Il contrôle les vidéos de sa création au rythme de la musique. Colorimétrie, fréquences et intensité évolue en tenant compte des changements d’ambiance.

L’envolée sauvage

C’est au tour du troisième Dj de faire sa place. Un décollage plus tard, nos émotions sont synthétisées dans un flot électronique. Je regarde tout autour de moi et constate que cette musique ne peut perdre personne. Nous sommes les invités de Mush. Celui-ci nous fait visiter les édifices de son monde que nous observons, dépaysés. Avec lui on révise ses classiques. Il hypnotise nos tympans avec ses synthés qui tournent en boucle, et on adore ça.

En tournoyant je fais la rencontre de Jonas, un berlinois qui est DJ dans le collectif The Dare Night. Ensemble, nous essayons de mettre des mots sur le show auquel nous assistons. Il me tape sur l’épaule et me glisse à l’oreille “ tu vois là c’est un très bon turntablist ! Le mec déguise super bien les cymbales et avec sa machine TB303 il produit un son bien acide à faire tomber le plafond!”.

Il est 5h et quelques. Nous découvrons les visages de nos voisins avec la levée des lumières. Jonas, tout sourire, m’annonce “il va nous faire atterrir en beauté !”. L’Atterrissage est effectivement un régal servi sur un plateau molletonné. Après avoir ovationné l’artiste, la salle se vide doucement et déjà les passionnés cherchent un after.

Suivez les soirées Encore et Papa Maman.
Crédit photo Gaétan Clément

Article rédigé par Maxime RETROPICALLS