Malgré une rentrée chargée en nouveaux projets d’envergures, il ne s’agirait pas de passer à côté du dernier album du discret Nosaj Thing. Avec ce 4ème projet, le californien nous embarque dans une renversante plongée dans les méandres éthérés et synthétiques de son esprit prolifique et avant-gardiste.
Seul artiste électro du label d’Hanni El Khatib Innovative Leisure, le jeune prodige a par le passé produit et travaillé avec Kid Cudi, Kendrick Lamar ou encore Chance The Rapper. À l’occasion de quelques remixes, il a fréquenté et collaboré avec des pointures de Los Angeles avec lesquels la filiation artistique semble évidente, comme Flying Lotus ou Daedelus. Nosaj Thing est de cette trempe d’artistes qui, à la manière de ses modèles Boards Of Canada et DJ Shadow, ne s’amuse pas à flatter les goûts du public en lui refourguant ce qu’il pense vouloir entendre, préférant toujours façonner de nouveaux univers musicaux.
Si cette démarche a de quoi déstabiliser – en témoigne la difficile écoute de son précédent album Fated, assez anxiogène et abstrait – elle est aussi vectrice de belles réussites. Comme son dernier EP No Reality, qui accouche d’un mélange House-IDM assez expérimental mais jamais hermétique.
Le producteur avait pourtant récemment fait face à une barrière créative certaine : le vol de son matériel et de toutes ses archives à Houston en 2015. Mais cette épreuve semble avoir été salvatrice pour sa musique car elle lui a permis de s’ouvrir à d’autres horizons, là où il semblait commencer à tourner en rond et à produire une musique sans âme. Du moins, c’est ce que semble confirmer Parallels, qui sonne comme une résurrection pour l’artiste.
S’il appartient toujours à l’univers du hip-hop, avec des prods très réussites comme
l’excentrique U G ou la sombre et virtuose Get Like, Nosaj cultive également des horizons musicaux liés à l’electronica, en témoigne Nowhere et sa valse pianistique vêtue de lignes de synthés gracieuses. Et que dire des époustouflantes envolées lyriques de Sister, traversées par des samples de voix féminines qui s’articulent à la manière d’un chœur autour de rythmiques downtempo. Premier single paru en ligne, All Points Back To U est probablement le climax de l’album, avec la beauté vrombissante et scintillante de ses synthés, qui enlacent le chant de Steve Spacek et ne sont pas sans rappeler le travail de Mark Pritchard avec Thom Yorke.
Avec des titres assez courts, Nosaj Thing a l’intelligence de s’arrêter lorsqu’il n’a plus rien à dire et esquive toute digression mélodique abusive. L’album trouve cette apesanteur qui nous envoie directement planer au milieu de somptueux rêves. Parallels est une réussite de la première à la dernière minute, et on s’y replonge avec ivresse tant son jeu sur la matière sonore est habile et jouissif, excitant à la fois le corps et l’esprit de son auditeur.