La série de clichés de Nicolas Gavino pour Graduate

Faire un shooting photo pour un concept store de mode streetwear, rien de plus classique : deux-trois décors urbains, des cheveux roses, un gang de potes looké 90’s et le tour est joué. Pourtant, Nicolas Gavino n’a pas eu la même réponse quand Graduate, le plus célèbre des concepts stores de Bordeaux, lui a demandé de mettre en scène sa marque. Il a eu carte blanche, et c’est plutôt en conservant son univers habituel oscillant entre l’érotique et le morbide que le photographe a enclenché la pellicule. Graduate a voulu écrire une histoire avec l’artiste, et cette série en est le premier tome.

« Pour cette série, je me suis concentré principalement sur deux thèmes : la perte du sacré et le parallèle entre l’érotisme et la mort. De sombres clichés où des corps, des écrans, des statues sont ensevelis sous une fine couche de poussière. Un univers amoindri, tragique et fragile. »

Nicolas Gavino est un artiste à part entière, il explore les corps féminins en simple appareil, des positions provocantes effleurants le vulgaire sans pour autant y laisser une trace de rouge à lèvres. Le noir et le blanc sont ses couleurs. Il met en image nos fantasmes dont il capture l’essence, de poussées hormonales aux prémices de jeux sexuels.

Dans cette série, Gavino conserve cet oeil coquin mais lui jette une couverture froide. Il mêle les symboles religieux aux poses des mannequins, montrant ainsi une fille à l’air inerte ou en plein trip, en position de croix sur un lit, avec pour crucifix un macbook et des smartphones. La trinité est désacralisée. Elle réapparait sur le cliché d’une fille endormie dans son lit dans la même position, cette fois un homme lui fait face et prolonge son corps jusqu’au limite du cadre, comme une ouverture vers l’infini. Des statues sacrées entreposées entre deux clichés agissent comme une image subliminale, nous rappelant à notre fatalité.

Côté mode, on retrouve un T-shirt Comme des Garçons enfilé par une fille, ce qui souligne la mixité du vestiaire dans le streetwear. L’homme porte lui un ensemble chemisette/short imprimé feu d’artifice dans un éclat stylistique bien choisi. La série photo ne laisse en tout cas pas de marbre, comme une expression à la fois lugubre et enchantée du corps humain.

Le livre photo a été imprimé en cent exemplaires et est disponible en libre service – jusqu’à épuisement des stocks – à la boutique Graduate.