Organisé en parallèle des Nuits Sonores, l’European Lab est un forum dédié à tout ce qui touche de près ou de loin le secteur culturel. Des politiques aux médias jusqu’aux nouveautés numériques, le Lab se veut le terrain d’enquête des nouveaux enjeux économiques et sociaux à l’échelle européenne.

Parce qu’au delà du seul évènement électro, le festival donne autant d’importance à ce cycle de rencontres et conférences, on vous a extrait cinq projets qui ont su nous marquer par leur audace, leur originalité ou leur créativité.

Unsound: the impacts of free internet on the creative world

Présenté au CIMMFest de Chicago, le documentaire “Unsound..” s’interroge sur notre comportement face au téléchargement, et son impact sur les artistes. On vous arrête tout de suite, il ne s’agit pas ici d’une énième campagne de propagande d’Hadopi, mais plutôt d’une interrogation sur ce qui a changé pour la création au cours des vingt dernières années.

Car si nous ne sommes plus du tout enclins, voire même capables de payer toute la musique qu’on écoute, quelles en sont les conséquences ? Combien d’artistes ont du laisser de côté leur passion ou travailler à McDo en parallèle de leur carrière ? Comme le montre le documentaire, la réponse n’est pas loin d’avoisiner le 99%.

Car si l‘on gratifie de plus en plus la musique indépendante, “underground”, être le premier à découvrir un jeune artiste, pourquoi sommes-nous de moins en moins prêts à le soutenir ? À défaut d’y trouver une solution, Unsound décrypte et formule un début de réponse éclairé à toutes ces questions.

Les Jours

Il y a quelques semaines que l’annonce a été faite : une partie des journalistes de Libération a pris la tangente du quotidien pour fonder un nouveau média 100% numérique, Les Jours.

L’idée ? Créer un site où « le modèle économique n’irait pas à l’encontre du modèle éditorial ». Le projet de base est donc celui d’un site d’informations qui ne se vouerait pas à la dictature du sacro-saint SEO auxquels assistent de gré ou de force nombreux journalistes, qui se retrouvent forts dépourvus depuis la transition web venue.

C’est avec cette frustration et ces nouvelles envies en tête que Les Jours comptent bien créer un modèle qui ne sera ni un copier-coller d’articles papiers vers un format web, ni un pure player dicté par la force du clic. Le tout avec la particularité « de fonctionner par obsession », soit de prendre un sujet et le traiter de fond en comble, jusqu’à épuisement de ses angles.

Depuis l’annonce de sa création, l’équipe taille, structure et affûte doucement son concept, en nous gratifiant de newsletters fréquentes sur leur avancée. On vous conseille vivement de vous y inscrire, leur mails sont garantis 100% sans spam.

De Jeunes Gens Mödernes

Les jeunes gens modernes aiment leur maman” titrait en 1980 la revue Actuel pour décrire la nouvelle scène française née après l’effondrement du mythe punk. Quel futur pour ces descendants des “No Future” ? C’est la question majeure que le documentaire pose aux artistes de cette scène, dont les différentes branches ont pu être qualifiées de post-punk, new wave, coldwave ou encore culture novö.

De Jeunes Gens Mödernes retrace donc une période à cheval sur les 70s et les 80s, avec l’arrivée de styles construits sur les cendres de l’éphémère punk anglais. Les témoignages d’Etienne Daho, Daniel Darc ou des membres de Marquis de Sade aident à reconstruire le portrait bordélique de la jeunesse de l’époque et de ses nouveaux codes, l’arrivée des synthés et une esthétique plus élégante et bourgeoise.

Et si les jeunes gens modernes sont pour beaucoup tombés dans l’oubli, reste qu’ils ont marqué la création française et su faire des émules. Le revival coldwave qu’on observe aujourd’hui avec des groupes comme Lescop ou La Femme en est le meilleur témoin. En bref, un documentaire à recommander à ceux qui verraient encore les 80s comme une décennie déserte de créativité.

Soundwalk Collective

Crée au début des années 2000, Soundwalk Collective est un projet situé quelque part entre l’urbanisme et la musique, les musées et les clubs, Berlin et New-York. En intervenant sur l’habillage sonore de lieux culturels – parmi lesquels le Berghain ou le Centre Pompidou – le collectif s’est bâti une belle réputation en quelques quinze ans d’activité.

Son projet phare consiste à faire découvrir des métropoles mondiales sous un nouveau jour, en invitant des artistes qui en viennent à créer des guides sonores de leur ville. Un accompagnement entre le musical et le narratif aujourd’hui disponible à Berlin, Londres, Paris, New-York ou encore Hong-Kong.

Outre leur intervention au Lab, la carte blanche laissée au collectif a permis à quelques chanceux de découvrir la performance “Close to the Knives: A Memoir of Disintegration”, en collaboration avec l’artiste-photographe de renom Nan Goldin et dans le cadre non moins prestigieux de l’Opéra de Lyon.

D.Lights Detroit

Que de documentaires prometteurs à cette édition de l’European Lab. Après un américain et un français, le dernier qu’on vous présente est un pont entre les deux pays, plus précisément entre les villes de Détroit et de Lyon. Coordonnée par le label local Jarring Effects, une équipe française est partie découvrir l’envers de Détroit, ville en déclin mais terrain de jeu de nombres de mouvements musicaux qui – on ne vous apprendra rien – a notamment vu naître la techno.

De la pauvreté économique naît souvent des étincelles de créativité. En racontant l’histoire de la ville à travers les yeux de ceux qui y vivent et y créent, D.Lights se veut être une passerelle entre les cultures. Passerelle qui ira d’ailleurs au delà du simple documentaire puisque le projet se prolongera en un album et une tournée.