Lucio Bukowski, c’est un rap qui fleure déjà bon le vintage. Des instrus jazz, des rimes en pagaille, et plus généralement, de la poésie à l’état pur. Pas d’artifices ni d’effets douteux. La seule chose que Lucio modifie, retravaille, sont ses textes et sa plume. Rien n’est dissimulé. Oderunt Poetas, son huitième projet solo, est l’occasion de rendre hommage à ce poète, plus auteur que rappeur.

On pourrait faire de ses paroles un recueil : Lucio Bukowski est un poète des temps modernes. Entre slam et rap, le membre du crew lyonnais L’Animalerie continue son introspection et ses hommages. Le phrasé est incisif, il lacère son époque. Le regard est amer, même si l’espoir n’est jamais loin. Dans les livres, notamment, qu’il érige en rempart de son humilité. C’est, en effet, une constante chez Lucio : la référence ne sert qu’à affirmer ses idées, non étaler sa culture.

L’écriture est toujours aussi soignée, la poésie de rigueur au fil des lignes. Le rappeur scande la mise à l’écrit de ses cris, de sa rage : “Les mots me viennent et j’leur ai rien demandé”. Auteur désormais aguerri, Lucio Bukowski établit un premier bilan de son œuvre, accompagné d’un constat amer : les fans de la première heure demandent du nouveau, les autres préfèrent ce qu’il faisait avant. Plutôt que de plier, Lucio reste fidèle à ses idées, au milieu des courants contraires.

J’fais de l’art, pas d’cette putasserie qu’ils appellent “game” 

Fait qui pourrait passer comme secondaire, la production et les instrus méritent pourtant autant d’attention que les textes. À l’appui de ses rimes, Lucio peut compter sur des prods aériennes, aux inspirations jazz. “Pourquoi haïssent-ils les poètes ?“, s’interroge le rappeur à travers son titre Oderunt Poetas. Probablement pour leur franchise ou leur talent. En ce qui le concerne, sûrement pour les deux.