Entre la crise du disque des années 2000, la mainmise des majors sur le marché de la pub digitale et la montée en puissance de l’électro ces dernières années, l’avenir de l’indie rock s’assombrit très nettement. La « Dont’ Believe The Hype » attitude d’Alex Turner et ses Arctic Monkeys s’en est allée après « Favourite Worst Nightmare », Arcade Fire pourrait se revendiquer comme genre à lui tout seul tellement les compositions de Win Butler sont hétéroclites, Bloc Party semble ne pas ressurgir – pour l’instant – de sa tanière après Four et Chris Walla a déserté Death Cab For Cutie après un neuvième album qui nous laissait sur notre faim. Malgré le retour de Liars cet été, d’Interpol en cette rentrée et de TV On The Radio prochainement, on ne peut imaginer un univers tout entier subsister avec une poignée de groupes en tête de file aussi talentueux soient-ils.

L’histoire s’écrit jour après jour de tant de manières, profilant un avenir plus ou moins lugubre pour le rock indé, caché derrière une brume déconcertante : l’agonie d’une musique occidentale à grosses guitares au profit d’une prééminence des polyrythmies et sonorités africaines. Foals nous donnait déjà un avant-goût de ce métissage musical en 2008, lorsque les codes de la culture pop occidentale se brassaient avec un dynamisme dance afro-américain sur Antidotes (ouvert par le très bon The French Open).

Pourtant, une région résiste coûte que coûte, se battant pour conjurer le sort d’un microcosme musical trop souvent sous-estimé. L’Australie regorge de groupes talentueux dont les compositions se montrent riches et séduisantes. Parfois sans exubérances vocales avec un touché léger au synthé, ou au contraire brillants lorsqu’il s’agit de mettre à contribution distorsions des guitares et rythmiques cavalières. On vous présente ici une liste non-exhaustive des artistes à suivre de très près. Des artistes qui prouvent que le pays des Kangourous et des Wombats (pas le groupe, le petit marsupial) est un bastion solide pour le rock indépendant et que cette belle épopée est loin d’être terminée.

Lyke Giants (Indie Rock / Shoegazing / Alternative)

Formé en Tasmanie (petite île au sud de l’Australie), Lyke Giants a beau être un poil éloigné de la scène locale, il n’en reste pas moins l’un des groupes les plus importants du coin. Fers de lance de la maison The A&R Department, le trio tire son nom du morceau We Looked Like Giants de Death Cab For Cutie, groupe pour ainsi dire cultissime tant ses compositions sont minutieusement travaillées et terriblement efficaces. On comprend de suite pourquoi le rock des Giants s’en inspire en mêlant des rythmiques entêtantes et des riffs de guitares qui nous rappellent sans trop forcer ceux de Casper Starreveld (Kensington). En tendant l’oreille, on renifle également quelques sonorités enlevées, sorties tout droit du shoegazing, genre underground qui semble influencer notoirement le groupe (tant et si bien qu’il le mentionne lui-même). Voilà un combo à suivre de près : l’exploitation des guitares ravira tant les fans de Bloc Party que ceux de The Boxer Rebellion.

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Glass Towers (Indie Rock / Indie Pop)

Ben Hannam a commencé à faire de la musique tout seul dans sa chambre, rêvant de partager sa passion avec d’autres. Difficile de monter un groupe dans une ville comme Sydney, sachant que la plupart des musiciens sont actifs du côté de Melbourne, capitale oblige. C’est donc tardivement, en 2008, qu’il fonde Glass Towers avec trois de ses copains de lycée. Favorisant la symbiose entre les couples d’instruments, les guitares se complètent aisément. La partie rythmique quant à elle, tient les rennes sans faiblir. Les morceaux du groupe catapultent autant de joie que d’inquiétude, jonglant entre riffs étincelants et accords un tantinet larmoyants. Leur incontestable sens du hit rapproche le quatuor de groupe comme Two Door Cinema Club (période Tourist History, quand c’était encore cool) ou de leur compatriote Cloud Control.

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Northeast Party House (Indie / Dance Rock)

Quand leur pote Sam Northeast organise la plus grande bringue de l’année, les rockers en devenir ne peuvent manquer l’événement. Au moment où le domicile se voit rebaptisé ‘Northeast Party House’ pour l’occasion, le quintet y voit là le nom idéal pour un groupe qui aime agir et faire se trémousser les foules. Très difficile à identifier, Northeast Party House fait partie de ces groupes qui parviennent à faire la différence tant en concert qu’en club. On privilégie ici l’efficacité d’un riff de guitare ou d’une ligne de basse à sa complexité. Le centre névralgique de leurs sons se situe au final dans un large panel rythmique. Tout va très vite et la batterie apparaît ici comme l’élément essentiel des structures musicales du groupe, mettant en avant des lyrics fédérateurs redoutables qui prennent rapidement le contrôle de nos cervicales. Nul doute que Northeast Party House pousse sur le dancefloor, à l’image d’un Cut Copy ou d’un Tom Vek, mais en (beaucoup) plus incitatif. En somme, un groupe indie qui remplacera volontiers un Dj pendant une fête.

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Battleships (Indie Rock / Alternative)

Après le succès de deux de ses singles sur le continent océanien, Battleships a récemment sorti son nouveau titre « You Can’t Change It ». Malgré la belle aventure de Jordan Sturdee et ses compères, ces derniers l’ont quitté il y a peu pour se tourner vers d’autres projets. Une sale histoire pour un groupe qui produit pourtant une musique douce et apaisante, le genre de sonorités qui forcent à la sympathie. Exécutées tout en finesse mais pleines de contrastes, leurs compos oscillent entre indie rock couillu et britpop naïve. On fera vite le rapprochement avec une brochette d’artistes comme Art Of Sleeping, The Paper Kits ou encore The Preatures – avec qui Battleships a tourné par le passé -. Les voix semblent froides mais rassurantes, si bien qu’on se paume un peu entre angoisse et béatitude. Les contres-temps rythmiques, les teintes sonores des six cordes et la façon dont sont scandées les paroles remémorent étrangement le mastodonte de Seattle qu’est Death Cab For Cutie (oui, encore eux). Une référence sûre qui devrait convaincre quiconque aimant les mélodies simples, calmes et bien exécutées.

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Snakadaktal (Dream Pop)

Signé auparavant sur I Oh You, label de DZ Deathrays, Snakadaktal avait pris à l’époque le parti de nous hypnotiser à grands coups de dream pop enchanteresse. Originale et bien pensée, leur musique avait effectivement de quoi nous appâter : un chant aguicheur contrasté par une utilisation massive des guitares…voilà qui n’est pas sans conférer un certain bol d’air frais. D’autant plus que les groupes du même genre (M83 et confrères) préfèrent insister lourdement sur l’emploi des synthés. C’est donc avec une simplicité ahurissante que le quintet nous berçait. Oui, l’emploi de l’imparfait est de mise : malgré un talent indéniable, Snakadaktal a splité en mars dernier, à notre grand dam. Et pourtant, la chose ne manquait pas d’être intéressante. Les morceaux construits de façon minutieuse et les notes de guitares métalliques plaidaient sans doute la cause de Foals mais proposaient aussi une approche différente de la dream pop mainstream avec laquelle on nous rabâche les oreilles tous les quatre matins.

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Covers (Indie / Pop)

Une formation indie pop qui sait se faire discrète. On ne sait pratiquement rien du trio de Melbourne sinon qu’ils se retrouvent perdus au milieu de la pluralité des groupes qui officient dans leur secteur, ou qu’ils ont préféré taper dans l’underground. En témoigne leur compte Soundcloud pour seule et unique présence en ligne. N’ayant sorti que deux morceaux, mais qui peuvent d’ores et déjà être considérés comme des tubes en puissance, Covers nous balade d’une époque à l’autre. Des relents de pop rétro rafraichissants à une sorte d’avant-garde très dark, il n’y a qu’un pas. Finalement, leurs titres ressemblent à une sorte de condensé musical onirique hors espace-temps.

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DZ Deathrays (Trash Pop / Alternative Rock)

Après le split de Velociraptor, un groupe mêlant garage rock et pop, Shane Parsons et Simon Radley décident de rester ensembles et forment DZ Deathrays en 2009. Après avoir tourné avec Blood Red Shoes, Die ! Die ! Die ! ou encore Slaves, les deux gars de Brisbane ont pondu deux albums et jouissent désormais d’une bonne notoriété internationale. À voir leur ancien groupe, il est clair que Parsons et Radley aiment le son chaud et gras des grosses guitares, mais restent admiratifs face à l’accessibilité de la pop music. De fait, le duo Trash Pop (c’est ainsi qu’ils définissent leur musique) expulse tout ce qu’il a en lui à coup de power chords et de riffs incendiaires combinés aux battements sourds d’une batterie (ou l’importance d’aller à l’essentiel). Autant le dire, les gars ont le pied sur la pédale de distorsion et n’hésitent pas à pousser la gueulante quand il le faut. Certains morceaux se veulent pourtant plus doux, prouvant ainsi que les boys arrivent à calmer le jeu de temps à autre. Finalement, on découvre ici un groupe honnête et authentique dans la retranscription de ses sentiments, une formation qui n’a pas peur de jouer sur un terrain miné.

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Shadowqueen (Alternative Rock)

Emmené par miss Robbi Zana, Shadowqueen balance un son puissant, assez sombre qui ne fait pas dans la dentelle. Avec une musique très burnée, on passe difficilement à côté des ressemblances avec Queens Of The Stone Age. De fait, vocaux intenses, guitares abruptes et tempo rocailleux sont au programme. La particularité de l’univers musical du groupe réside irrémédiablement en sa chanteuse dont le timbre âpre, quoi qu’assez gracieux, montre la quintessence de son âme sur la plupart de morceaux. On pense naturellement à Alison Mosshart (The Kills, The Dead Weather) ou encore Mlny Parsonz (Royal Thunder). Elle nous rappelle à l’ordre dans un laps de temps particulièrement court, nous montrant qu’elle possède une paire de couilles à en faire fuir Justin Bieber. Les aficionados de Blood Red Shoes s’y retrouveront dans le son, idem pour ceux de Royal Thunder (pour les plus initiés).

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